Luxation

Lundi 1er juin 2020

Ça ne fait pas longtemps qu’on est sorti du confinement COVID-19 et je n’ai pas encore fait de sortie VTT à la montagne. Damien me propose en ce lundi de Pentecôte d’aller à Morgins avec un groupe de ridereuses qu’il connaît. On décide de faire un première petite montée d’échauffement pour descendre par une des pistes du bike park, et ensuite attaquer le «vrai» tour. Je suis descendu cette piste à plusieurs reprises ces années passées en DH, donc en principe, je la connais. Peut-être que là se trouvait le problème, ou peut-être que je me suis mis un peu la pression en roulant avec ce groupe d’inconnu(e)s. Quoi qu’il en soit, peu avant la fin de la descente[1], ma roue avant a tapé quelque chose, puis plus rien.

Crack la direction
Crack la direction
Crack la direction
Crack la direction

J’ai l’impression d’avoir entendu le crack du carbone du cadre avant de m’éteindre. Comme dans les films, j’ai quelques flashes du reste de la descente à pied; qu’on me demande si je préfère descendre à pied ou à vélo, que je réponds à vélo en ne voyant pas de problème à ça; de Damien qui fait des blagues qui me font trop mal aux côtes parce que je me marre; de l’arrivée et la montée dans l’ambulance; de répondre aux questions des ambulanciers, de leur fournir le nom de mon employeur, mais de ne pas parvenir à l’épeler. J’avais constamment cette sensation d’être dans un rêve, que j’allais bientôt me réveiller, que ce n’était pas réel. Le tout a probablement duré un peu plus de 2h.

Facture d’ambulance
Facture d’ambulance

Le passage à l’hôpital de Rennaz est plus clair. On m’a fait un scan des cervicales et une radio de l’épaule. Tout a l’air ok, rien de cassé. On me demande de ne pas passer la nuit tout seul, procédure apparemment standard après une commotion. J’ai le choix entre appeler Mom, qui habite à 10 minutes en voiture, mais qui n’a pas de voiture et qui risque de ne pas pouvoir s’empêcher de me faire la morale, et appeler mon cousin qui habite à 1 heure en voiture, et qui lui-même a l’habitude des accidents de vélo. J’opte pour le cousin.

Mardi 2 juin

Après une nuit normale, je reste quelques heures chez mon cousin, puis rentre à Lausanne en bus et train. Je suis en arrêt de travail à 100% aujourd’hui et demain pour reposer ma tête.

Mercredi 3 juin (2 jours)

Je ne fais rien de particulier, la journée reste très nébuleuse. Je dors très mal dans la nuit à jeudi.

Dimanche 7 juin (6 jours)

Je suis en visite chez mon père, après une fin de semaine normale à bosser chez moi, comme depuis des mois suite au COVID-19. J’ai essayé de dormir assis une partie de la nuit parce que j’avais trop mal à l’épaule. Pendant une ballade de 5 km le long du lac et dans le village voisin, j’essaie de ne pas trop bouger mon bras, mais honnêtement mes nouvelles chaussures me font plus mal que mon épaule à ce stade.

Pourri de partout
Pourri de partout

Mercredi 10 juin (9 jours)

J’en ai marre de vraiment mal voire pas du tout dormir, et la nuit passée m’a poussé à me rendre au Centre Médical de Vidy malgré ma précédente expérience mitigée. Dre Arife Ipek soupçonne une luxation de l’épaule et exige une IRM. Ça me semble pas mal. Elle constate également que la plaie de l’impact au sol sur l’arrière de mon épaule s’est enflammée, alors que j’ai scrupuleusement suivi les instructions de l’infirmière de l’hôpital de Rennaz. A noter que la première infirmière avait dit qu’il n’y avait pas besoin de pansement et qu’il suffisait de laver la plaie délicatement au savon, alors que la seconde m’a fait un pansement étanche qu’il a fallu garder 48h. Et qui a donc pourrit ma plaie. La doctoresse me prescrit des antibiotiques, mais aussi des anti-inflammatoires et du valium pour relaxer mes muscles et mieux dormir. Jamais je ne me suis présenté à la pharmacie avec une liste de médicaments aussi longue. Jusqu’à l’IRM je dois également porter une attelle, la même que pour la fracture de ma clavicule. Je suis à nouveau en arrêt de travail, au moins jusqu’à la visite médicale suivante, qui sera après l’IRM.

Pansements, désinfectant, relaxant, anti-bio, anti-inflammatoire…
Pansements, désinfectant, relaxant, anti-bio, anti-inflammatoire…

Vendredi 12 juin (11 jours)

Grâce au valium, je passe des nuits quasi normales. Je ne peux pas travailler à 1 bras, mais pour m’occuper je peux aller en train récupérer mon vélo qui est resté dans un shop à Morgins.

Mardi 16 juin (15 jours)

Je me suis rendu au Centre d’Imagerie de Lausanne-Epalinges (CILE) pour l’IRM hier soir, mais ils ont remarqué qu’un des clichés était flou. Donc je dois repasser, avant mon rendez-vous avec Dre Ipek pour le diagnostic dans l’après-midi. Le verdict, 15 jours après l’accident, est: luxation acromio-claviculaire[2] de stade 2. On me donne une nouvelle attelle puisqu’il s’avère que la précédente n’est plus suffisamment rigide. Au menu médicamenteux s’ajoute du Paracétamol (anti-douleur) et du Voltaren (anti-inflammatoire).

Le ligament acromio-claviculaire relie l’os de la clavicule à l’acromion, une partie de l’omoplate. Une luxation de stade 2 signifie une déchirure partielle ou une élongation de ce ligament
Le ligament acromio-claviculaire relie l’os de la clavicule à l’acromion, une partie de l’omoplate. Une luxation de stade 2 signifie une déchirure partielle ou une élongation de ce ligament

Samedi 20 juin (19 jours)

A 5h du matin, je finis par prendre un Paracétamol après m’être réveillé 4 fois. C’est le premier anti-douleur que je prends depuis l’hôpital il y a presque 3 semaines. La nuit du 20 au 21 est assez pourrie aussi, mais je ne prends rien. La suivante est pire et j’opte pour le valium. Il faut varier les plaisirs.

Super-pouvoir de guérison instantanée
Super-pouvoir de guérison instantanée

Samedi 27 juin (26 jours)

J’ai un rendez-vous avec Dre Ipek, mais c’est un autre docteur qui se pointe. Selon lui, tout est ok, je n’ai plus besoin de porter une attelle et donc peux à nouveau travailler. J’opte pour quand même garder mon petit corset pour dormir, encore 2 nuits. On me donne un bon pour 6 séances de physio.

Mercredi 1 juillet (30 jours)

Première de neuf séances de physio avec Alexandre au Centre Médical de Vidy, où on fera plein de différents exercices avec un élastique, mais aussi quelques massages. Je fais ces mêmes exercices tous les soirs chez moi pendant 30–45 min jusque fin août.

Dimanche 12 juillet (41 jours)

Je me rends à vélo au trail de BMX (2×25km). Tout va bien. Idem une semaine plus tard.

Mardi 21 juillet (50 jours)

Je tente de jouer au beach volley avec mes collègues de boulot. Tout va bien.

Jeudi 23 juillet (52 jours)

En guise de rééducation de mon épaule, je décide de faire des séances de pumptrack à Aigle. Je m’attendais à utiliser le même pumptrack que j’avais roulé il y a une quinzaine d’années, mais en arrivant sur place, je découvre un magnifique nouveau pumptrack Velosolutions. Tout va bien.

Vendredi 7 août (67 jours)

Après plusieurs soirées au pumptrack, je décide qu’il est temps de tenter une session au skatepark de Plainpalais. Tout va bien. Musculairement, l’épaule tient bon, mais je n’ose pas imaginer ce que ça donnerait en cas de chute.

Epilogue

Mes blessures ont l’air de devenir de plus en plus fréquentes: 1995, 1999, 2010, 2014, 2018, 2020. Est-ce que je deviens à ce point mauvais? Est-ce que mon corps se fragilise? Est-ce de la pure malchance? Ce qui est sûr, c’est que cette dernière chute m’a un peu calmé. Peut-être parce que j’ai tapé la tête. En tout cas, je suis un peu moins à l’aise en VTT là tout de suite. Mais ça reviendra certainement. J’espère que mon épaule gauche restera solide après la fracture de la clavicule en 2014 et cette luxation. Je vais en tout cas continuer à faire du fitness (dès le COVID-19 passé) comme depuis 2006. J’ai une légère touche de piano, mais je ne sais honnêtement pas si je l’avais déjà avant. Ça illustre le peu d’attention et d’amour que je porte à mon corps. Selon le physiothérapeute, j’ai perdu un peu de mobilité, mais là pareil, c’est possible que je l’aie déjà perdue après la fracture de la clavicule. Les séances de physio qui avaient suivi l’opération étaient uniquement axées sur la force et pas la mobilité.

Le vélo

Il y a une tendance dans le VTT d’enduro de produire des vélos avec de plus en plus de débattement. Donc ça fait quelques mois que je jouais avec l’idée de remplacer mon Hightower et mon DH par un unique vélo. Moins de vélos à la cave, moins d’entretien, pas de temps perdu à se réhabituer au vélo en passant de l’un à l’autre. Lorsqu’à ma surprise, Santa Cruz Suisse m’a proposé de remplacer mon Hightower fissuré par le nouveau cadre (mon modèle d’il y a 3 ans n’étant plus en stock), je leur ai demandé s’il y avait moyen de faire un upgrade vers un Megatower. Ils m’ont alors suggéré un cadre Megatower CC pour CHF 250 (valeur CHF 4000 neuf). Ok! Sur le nouveau Hightower j’aurais dû changer mon amortisseur pour passer de 130mm à 140mm et modifier la fourche pour passer de 140mm à 150mm. En passant sur un Megatower, je dois changer la fourche et l’amortisseur, pour passer à 160mm.

Santa Cruz Megatower vs. Hightower
Santa Cruz Megatower vs. Hightower

Ce remplacement de vélo était laborieux:

Trois mois après ma chute et environ CHF 2500 plus tard, j’ai une semi-nouvelle bicyclette.

Megatower
Megatower

  1. je pense que l’accident s’est produit à l’endroit vers 2:28 dans cette vidéo (qui n’est pas de moi) ↩︎

  2. English: AC joint tear. Deutsch: Schultereckgelenksverrenkung. ↩︎